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Didier Pitelet

auteur du livre:

Les patrons sont morts, vive les patrons.

Les enjeux de la réputation d’entreprise.

Didier Pitelet, créateur du concept de « marque employeur », fondateur en 2006 de DreamGroup (Onthemoon, RP-Onthemoon, E-Walking, DreamSearch), premier groupe de Conseil en réputation d’entreprise, vient de publier chez Alban Editions : « les patrons sont morts, vive les patrons. Les enjeux de la réputation d’entreprise ».

Dans cet ouvrage, Didier Pitelet appelle les dirigeants d’entreprise à donner du sens aux projets collectifs, à mettre l’humain au coeur des stratégies, à retrouver le lien avec des générations montantes qui risquent de se détourner de l’entreprise si elles n’y trouvent pas les valeurs qu’elles recherchent.

Avec une grande liberté de ton, il dresse un tableau sévère des pratiques managériales actuelles, pratiques qui ont contribué à enliser bon nombre d’entreprises dans la crise que nous traversons. Mais des solutions existent…!

Un livre que les membres du Cercle du leadership doivent lire sans modération…. interview.

 

Le Cercle du Leadership : Didier Pitelet vous n’hésitez pas dès le début de votre livre à balayer certains concepts qui vous paraissent dépassés ; On est surpris par exemple de constater que vous fustigez  » la fierté d’appartenance »  pour lui préférer « la fierté d’adhésion ». Cela mérite une explication.

Didier Pitelet : L’explication est simple : la fierté d’appartenance est un concept né durant les trente glorieuses en parallèle de l’entreprise « seconde famille » qui incarnait la réussite sociale ; on existait par et avec son entreprise et son travail. Cette période n’a pas survécu au choc pétrolier de 1975 et fût balayée par les trente piteuses synonymes de yoyo social, d’explosion du chômage de masse, y compris chez les cadres, de trois générations kleenex… etc.

En trente ans le front de l’emploi n’aura été porteur qu’à peine dix ans (1987/91 – 1997/2000 – 2006/09) et aura démontré l’incapacité des entreprises à bâtir un discours vrai et pérenne. Leur capacité à dire tout et son contraire au gré des aléas climatiques des marchés financiers a désacralisé les paroles des dirigeants et décrédibilisé la communication des entreprises.

En France, prés de 50% des managers trentenaires déclarent ne pas adhérer aux valeurs de leur entreprise, Edifiant !

Aujourd’hui plus personne, et en particulier les jeunes ne veulent appartenir à une entreprise. L’entreprise consommatrice de Talents a crée les salariés consommateurs d’entreprises. De l’antique fierté d’appartenance à la Papa (ou du Petit Chef) qui perpétue une relation dominant/dominé, la société civile impose la migration vers une fierté d’adhésion qui élève et reconnait l’individu en Partenaire d’un projet.

Cela impose à l’entreprise à se penser et à se donner à vivre en mode projet. Une révolution pour les modèles de Management et de gouvernance ; un défi pour les DRH qui ont là l’opportunité d’assumer une vraie dimension stratégique au nom de la performance de l’entreprise.

 

Le CDL : Un des thèmes que vous développez le plus est celui de la crédibilité de la parole du dirigeant. Pourquoi estimez-vous que la plupart des dirigeants ont perdu cette crédibilité auprès de leurs salariés ou de leurs clients ?

Didier Pitelet : Plus l’entreprise est importante plus le propos s’impose, de surcroit si elle est cotée : en 20 ans la pression de la rentabilité à court terme des marchés financiers qui a abouti à la crise de l’automne 2008,  a accouché d’un modèle de dirigeants salariés interchangeables tous les 3/5 ans obnubilés par deux feuilles de route : celle de l’actionnaire et celle de leur carrière (le job d’après…).

J’ai conscience d’en choquer plus d’un, d’autant et heureusement qu’il existe des contre exemples. Mais ce miroir objectif, aussi difficile à regarder soit-il, crée une grande différence entre ce type de profil standardisé et les dirigeants entrepreneurs, propriétaires ou pas.

Les Vrais Patrons sont par essence des Femmes et des Hommes providentiels qui font leur, l’histoire de l’entreprise, qui se donnent corps et âme à leur entreprise et à leurs équipes, qui habitent leur vision et leur parole et qui surtout font de la Marque de leur entreprise une source de fierté à vivre.

Une marque c’est un maillot porteur de sens, de valeurs, d’une identité à des années lumières du baratin institutionnel. Un maillot qui réclame une exemplarité totale du Chef. Etre dirigeant est une chance qui se mérite.

Aujourd’hui on confond trop diriger et régner.

Les équipes ont besoin de croire en un Leader, or un titre ne fait pas le leadership, il n’y a que des preuves de leadership ! En 20 ans la tête s’est coupée du corps, créant une colonne vertébrale, le management, déboussolée et des équipes qui n’y croient plus.

Trop de dirigeants, focalisés sur le taux d’ebit, ne réfléchissent pas à leur devoir de transmission et ne se rendent même pas compte qu’ils ne transmettent plus rien à leurs équipes.

Les nouvelles technologies ouvrent l’ère de la e-Gouvernance, c’est une vraie opportunité à saisir.

 

Le CDL : Le Cercle du leadership va prochainement organiser une conférence sur le leadership féminin. C’est également un thème que vous abordez. Vous dites même que les valeurs féminines sont de nature à sauver l’entreprise.. Qu’en est-il ?

Didier Pitelet : La société civile, l’évolution des mœurs  et la démocratie directe du web nous font migrer : on trouve la force, le cynisme, la lâcheté dans les rapports humains vers des valeurs plus féminine en effet : le respect de l’autre et des différences, la réhabilitation du Temps Humain, la créativité, la transparence…

Il ne s’agit pas d’une rupture mais d’un rééquilibrage qui va s’imposer dans les années à venir au nom d’une intelligence de la transparence justement.

Aujourd’hui tout se sait, tout se dit en temps réel. Celui qui hier tirait une légitimité ou un pouvoir de l’information est destitué au profit d’une ingérence émotionnelle permanente.

Cette mutation nous fait sortir du joug de la communication au profit d’une vraie stratégie de Réputation pour l’entreprise. Or la réputation ne se bâtit qu’à partir de Preuves. Très féminin comme logique.

 

Le CDL : les jeunes générations celles que vous appelez la génération Y est en train de se détourner des entreprises. Quelles sont les modèles qu’elles recherchent et comment les entreprises peuvent-elles les attirer et surtout les retenir ?

Didier Pitelet : Je ne crois pas que les jeunes se détournent de l’entreprise, bien au contraire. Ils se détournent d’un modèle et d’une hypocrisie ambiante. Deux chiffres à méditer : 75% des 20/25 ans ne veulent pas ressembler aux Patrons actuels jugés peu courageux, à la merci de l’actionnaire et peu soucieux des hommes.

Les 15/24, ans, à la question : « comment voyez-vous votre avenir ? » répondent 1. Créer une boite 2.  Rejoindre une entreprise du privé (CSA avril 2009). Ils veulent être maître de leur vie c’est un fait ; ils veulent des preuves, du concret et surtout de vrais projet.

La culture Maison incarnée par un vrai leader est aussi capitale. N’être qu’un numéro, trop peu pour eux ! Surinformés, connectés non stop à leurs tribus, ils sont dans le partage avant tout.

Point commun avec les jeunes de toutes les époques, ils veulent qu’on leur fasse confiance. Ils sont pour la plupart courageux, engagés mais ne sont pas des Béni oui-oui.

L’importance et l’exemplarité du management est essentielle pour les motiver et les fidéliser. Et oui un jeune peut être fidèle, à condition d’y trouver son compte.

Toutefois les politiques actuelles de stop and go et de congélation des rapports humains dues à une crise qui ne change rien aux problèmes de bascule démographique crée une suspicion importante à l’égard des entreprise et réclame de sérieux efforts là aussi de transparence pour espère être crédible.

L’effet boomerang va être terrible des que la Job Machine va s’emballer !

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