Le débat sur les  parallèles qui existent entre le monde du sport et celui de l’entreprise (voir le résumé par ailleurs à la rubrique « Synthèses de nos débats »)  nous a permis -chose toujours passionnante- de rencontrer de nombreux sportifs ou anciens sportifs de haut niveau.

Nous avions là des athlètes, des rugbymen, des adeptes des arts martiaux, une pentathlète, une championne de tennis, de ski, un  grand pilote automobile et moto , bref des sportifs assez différents  les uns des autres de par leur discipline. Pourtant un point les caractérise et les réunit : ce sont tous des compétiteurs !

Dès que le mot est lâché, leurs yeux s’éclairent, leur voix s’enflamment, la passion les reprend. On sent qu’ils sont dans leur élément. Ils sont sur leur terrain.

L’esprit de compétition est l’ADN du sportif ! En tous cas du champion, de celui qui s’est élevé au dessus des autres.

Dès lors, leur tentation est grande de nous inciter à les imiter et de  nous entraîner dans leur sillage où l’énergie est reine, le doute est réduit à néant et « la gagne » érigée au pinacle.  Le dirigeant devrait être un athlète de haut niveau et emprunter au monde du sport les mêmes  ingrédients pour vaincre.

L’affaire est séduisante et l’on peut facilement s’y laisser prendre tant certaines évidences sont criantes. L’entreprise est par nature un monde de compétition ; on gagne une part de marché comme on gagne un match. On dépasse un concurrent parce qu’on a envie de le battre ; on ne s’impose que si l’on est meilleur que les autres. Donc, oui, cultivons l’esprit de compétition,  instillons au cœur de chacun la graine qui fera éclore le champion-dirigeant.

Pourtant le sage résiste à cette tentation  et rechigne à emprunter le pas alerte et conquérant du sportif !

 L’entreprise est un corps social

La  raison tient à ce que si l’équipe de sport est incontestablement un corps d’élite, l’entreprise est davantage un corps social. Cela change la donne.

En sport, chaque équipier doit être au diapason des autres et tourné vers le seul objectif possible, la victoire ! On comprend que l’esprit de compétition soit la vertu essentielle et que la sélection de chaque joueur se fasse à l’aune de ce critère.

Mais l’entreprise, elle, est plus diverse, plus complexe, plus vaste,  plus représentative de ce qu’est la société aussi.  C’est un monde vivant. Si elle est un lieu de compétition, elle ne peut pour autant être composée que de  compétiteurs.

Elle  a besoin de personnes diverses pour réussir. De compétiteurs certes, notamment dans les fonctions du front,  mais elle doit aussi rechercher d’autres caractères ; des lents pour réfléchir ; des doux pour mettre de l’harmonie ; des sérieux pour organiser ; des austères pour compter ; des fous pour innover… et elle doit surtout s’attacher à ne pas monter tout ce petit monde les uns contre les autres.  Là réside tout l’art du leadership.

En définitive on retrouve à  travers ce débat, certains des invariants qui reviennent en boucle à l’occasion de beaucoup de nos réflexions : la vertu est dans la diversité  pas dans les stéréotypes !

Au moment où j’écris ces lignes, démarre le Vendée Globe et je pense à Titouan Lamazou qui en fut le premier vainqueur. Lorsqu’on lui parle de cette période où il fut un champion, il répond que sans rien renier de ce qu’il a fait, il n’a aucune nostalgie de l’esprit de compétition  qui le guidait alors. La fin de sa carrière de sportif de haut niveau lui a permis de s’en affranchir, de trouver une liberté nouvelle et d’actionner d’autres moteurs pour s’épanouir.  Et lorsque l’on voit avec quel talent  il est devenu poète, écrivain, photographe ou dessinateur on se dit que d’autres ressorts peuvent nourrir de grands desseins.

 

Philippe Wattier- Nov 2012

 ___

Partenaires du Cercle :

Bic - BCPE - Korn/Ferry - Mckinsey - Tinyclues - Veolia Environnement - Manpower - Mazars