Cycle Mama Shelter

François Sarano avec Grand Requin Blanc

Donnons du talent à la nature

Avec le témoignage de :

François Sarano
François Sarano
Docteur en océanographie
co-scénariste et plongeur du film “Océans


Résumé de la conférence de François Sarano

François Sarano est un de ces personnages hors normes que le Cercle du leadership est fier d’avoir pu rencontrer.

Son doctorat d’océanographie en poche, il ne sait pas très bien comment orienter sa carrière. Le commandant Cousteau lui propose alors d’effectuer  un court stage de deux mois sur la Calypso, en partance pour une expédition en Haïti.  François Sarano y restera 13 ans jusqu’à la mort du commandant Cousteau précisément, en 1997.

Avec lui, il découvre la réalité des océans ; plonge dans les mers du monde entier ;  observe la vie des espèces vivantes Son attachement au milieu marin s’affine de jour en jour.

Redevenu un instant un terrien,  François Sarano s’en va a la rencontre des hommes, sillonne la Lybie ; écrit un guide sur ce pays ; il s’intéresse un temps à la paléo anthropologie, mais l’appel des grands fonds est le plus fort. Au début des années 2000, François Sarano rencontre Jacques Perrin, réalisateur de « Microcosmos » et du « Peuple migrateur ». Ce dernier le convaincra de l’accompagner dans le tournage du film « Océans ». Ni l’un, ni l’autre ne se doute alors que cette aventure durera près de dix ans.

François Sarano s’engage avec l’équipe de « Galathés films ». Il est à la fois le coscénariste et le plongeur de ce film qui sort en 2010 sur les écrans du monde entier avec le succès que l’on sait.

Le Cercle du leadership voulait proposer à ses adhérents une réflexion sur ce qu’il est convenu d’appeler le développement durable. Nous voulions le faire avec un scientifique certes mais aussi avec un témoin de la nature et surtout un amoureux de la mer.  François Sarano nous a comblé  au-delà de nos espérances, car il nous a démontré que préserver la nature c’était tout simplement sauver l’homme, non  seulement en lui permettant d’assurer sa survie et celle des générations futures -ce qui constitue une vision assez classique de la question- mais en préservant son âme, son talent sa relation même aux autres hommes..

« Donner du talent à la nature »  puisque tel était le titre de notre débat, revient en l’occurrence à donner du talent à l’homme.

 

Quels hommes voulons-nous être ?

Lorsqu’on lui demande pourquoi le combat pour la préservation de la nature est important, François Sarano nous renvoie à nous-mêmes. Pour lui, la question n’est pas de savoir quel océan nous voulons ou quelle nature nous voulons, la question est de savoir  quels hommes nous voulons être.

« Si nous savons faire une place à la baleine bleue, au grand requin blanc, au gorille… à tous ces encombrants qui ne servent à rien ; si nous accordons un peu d’attention au gobie à tête d’or ou au poisson volant, à tous ces insignifiants qui ne servent à rien… alors nous saurons aussi respecter chacun d’entre nous dans sa différence ».

Ou, comment le thème par ailleurs mis en avant par le cercle de la diversité ressurgit dans une cohérence absolue à l’occasion de ce débat sur l’écologie.

Mais on retrouve également le thème du sens, de la conscience de soi et de la résilience dans les propos de François Sarano. « Accepter la nature, c’est accepter des espaces qui échappent à nos règles, à nos calculs, à nos exigences de rentabilité. L’homme n’a pas uniquement besoin de la nature pour en prélever les ressources, il a aussi besoin de l’imprévisibilité du monde vivant, il a besoin de rêve. »

La nature et son rythme immuable nous enseigne que l’entreprise a perdu la notion du temps… tout s’est accéléré de façon vertigineuse au cours des dernières décennies. Le sens de la recherche, la nécessité de l’expertise, la qualité de la réflexion ont souvent cédé le pas devant l’exigence du résultat immédiat. C’est aussi un thème d’attention utile pour le dirigeant que d’intégrer dans sa prise de décision la notion de rythmes plus « naturels ». La nature nous rappelle à notre devoir de patience.

Porter attention à la nature, ce n’est pas uniquement préserver l’environnement et les ressources, c’est donc préserver nos valeurs essentielles.

 

C’est en plongeant qu’on rencontre les hommes

Etrange paradoxe en effet que celui-là. Loin d’incarner le monde du silence ou le mythe du plongeur solitaire, François Sarano  préfère mettre en exergue l’exceptionnel travail en équipe et l’absolue nécessité d’une préparation rigoureuse et la préparation pour expliquer les succès de ses entreprises.

Le succès de la plongée, sans aucune protection, avec le grand requin blanc qui constitue une première mondiale, ne s’explique pas autrement.  On ne pouvait s’appuyer sur aucine expérience puisque personnes n’avait jamais rencontré le requin blanc autrement que derrière une cage. Avant d’affronter le prédateur et de parvenir à ces images incroyables qui nous sont proposées dans le film « Océans »montrant un homme nageant de façon totalement apaisée aux cotés du requin « épaule contre nageoire »,  il a fallu des centaines de plongées pour observer, analyser,  comprendre les réactions du prédateur, familiariser chaque membre de l’équipe avec son rôle,  savoir les erreurs à éviter, trouver les échappatoires  en cas de difficultés.  « Maintes fois il a fallu remonter car un des membres de l’équipe ne pouvait supporter le poids de l’évènement », ce qui, rajoute François   témoigne qu’en plongée, « la valeur de l’équipe est déterminée par son maillon faible ».

Dans ces conditions si l’on élever le niveau général de l’équipe il faut d’abord s’attacher à élever le niveau de son membre le plus faible et entourer celui qui est dans la difficulté.

Belle leçon pour nous autres dirigeants d’entreprise, qui pouvons avoir le reflexe inverse :   laisser sur le bord du chemin qui ne suivent pas le mouvement pour ne s’intéresser qu’aux meilleurs.

 

La nature nous révèle à nous-mêmes

C’est en ce sens que la nature dans son impitoyable force nous révèle à nous-mêmes et nous permet de nous transcender. Quand la voie est ouverte c’est une source d’apaisement inestimable.

Pour plonger il faut une équipe cohérente avant tout.

Il faut que chacun connaisse et exécute son rôle à la perfection.

Il faut faire une confiance totale à l’autre car au cœur de l’action on ne peut communiquer autrement que par quelques gestes rudimentaires.

La nature,  en l’occurrence la mer, qui est le dernier territoire sauvage de la planète permet de découvrir des territoires nouveaux,  certes, mais aussi de nous découvrir nous-mêmes, de  vaincre nos peurs,, d’accepter des  règles du jeu différentes des nôtres, des espèces nouvelles,  de lever des tabous.

 

Les espèces vivantes sont notre richesse.

Une espèce vivante c’est un tissu de relations. Une espèce qui disparaît c’est donc un tissu relationnel qui est supprimé. C’est un effort pour accepter une différence qui n’a plus lieu d’être or on sait que c’est cet effort là qui est une source de progrès.

Une espèce vivante c’est un rythme immuable, fait de lenteur. Les principales espèces : les requins, les baleines, les grands prédateurs terrestres,  les éléphants… sont à durée de vie courte et à maturité lente.  Or ce rythme est aujourd’hui mis à mal par la réduction de la notion d’espace-temps et par l’accroissement de la population mondiale (rappelons que la population mondiale va être multipliée par cinq en l’espace d’un siècle). Ne plus respecter ce rythme c’est courir le risque de supprimer tout ce qui nous entoure et qui n’est pas directement productif.  Voulons-nous demain être les seuls habitants vivants avec les mollusques et les insectes ? C’est le risque que nous prenons si nous ne respectons pas le rythme naturel de reproduction des espèces.

Nous retirons de cette rencontre avec François Sarano le sentiment que le combat en faveur de la nature nous offre une réelle opportunité de nous révéler, de nous éduquer et de transmettre à nos enfants, non seulement une planète préservée  mais également une philosophie de vie.  Elle nous offre un terrain d’exploration intérieur et nous permet de nous dépasser. Elle nous incite à nous assembler aux autres pour relever les défis gigantesques que nous ne pourrions mener seuls. Elle  nous invite à accepter les différences et à provoquer les rencontres. Elle nous permet de révéler notre propre talent.

De ce point de vue l’attention portée au développement durable n’est rien d’autre que l’attention portée à nous-mêmes, à notre façon d’être.

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