Présentation du cycle d’études 2013 

Présentation du cycle d’études 2013 par Philippe Wattier

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Notre cycle d’études 2013 a pour objectif d’identifier les causes qui nous amènent à éprouver le sentiment d’un chaos mais aussi et surtout de faire émerger des solutions utiles aux dirigeants face à l’expression de ce chaos.

Au cours de cette première conférence, notre objectif a été de construire, par une démarche participative de tous les membres du Cercle, ce que sera la suite de notre cycle en identifiant de façon précise les origines de ce chaos et en faisant émerger, thème par thème, les  solutions possibles et les attitudes à adopter par les dirigeants face à cette transformation radicale de nos sociétés. Chacun éprouve ce sentiment d´un chaos avec un point d´entrée qui n´est pas forcément le même.

  • François Eyssette, ancien dirigeant au sein de Sociétés multinationales et
  • Bruno Luc Banton, psychanalyste, Conseil de hauts dirigeants et ancien chasseur de têtes,

nous ont aidé à  cerner les symptômes de ce chaos, à en comprendre les causes, à en préciser les définitions, à mettre des mots sur ce que nous ressentons.

Puis, nous nous sommes séparés en cinq ateliers de travail sur chacun des thèmes que nous avons identifié comme étant autant de sources de changements qui affectent nos pratiques   managériales.

  • Les Nouvelles Technologies,
  • La Globalisation,
  • La Démographie,
  • Le Sociétal,
  • L´Environnemental,

avec sur chaque thème la volonté de répondre à trois questions :

– quels sont les points qui nous paraissent les plus anxiogènes dans l’univers professionnel ?

– qu’est ce qui contribue principalement à développer le sentiment d’un chaos dans l’univers personnel ?

– parmi les actions possibles, quel est l’angle que le Cercle du leadership pourrait choisir pour faire émerger des solutions utiles aux dirigeants ?

Au cours de cette matinée, chaque participant a été amené à contribuer au travail d´un atelier.

Des conclusions que nous tirerons de cette séance de travail, découlera la suite précise de notre programme.

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« Les causes exogènes du chaos » 

francois_eyssette

(par François Eyssette, propos recueillis par Philippe Wattier)

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Si le thème qui servira de fil conducteur  à nos travaux de l’année 2013 a fait à ce point l’unanimité parmi les partenaires du Cercle, c’est que d’une manière certaine tout le monde éprouve aujourd’hui le sentiment d’un chaos. Ce sentiment est exacerbé depuis une dizaine d’année, c’est une des caractéristiques de notre siècle naissant.

Ce sentiment est provoqué par des causes  diverses.  Certaines sont bien entendu inhérentes à l’Homme -c’est l’affaire du psychanalyste que de nous éclairer sur ce point-, mais d’autres sont incontestablement exogènes et trouvent leur racines dans  notre environnement, sinon  pourquoi assisterions-nous à cette formidable accélération du phénomène ?

Les causes exogènes de ce malaise,  de cette souffrance, sont à peu près clairement identifiées, même si elles sont différentes pour chacun d’entre nous ; elles résultent principalement des fortes évolutions du modèle de société auquel nous avons été préparés.  Du coup, le sentiment que les choses nous échappent  est une réelle cause de malaise. Cela est vrai de la course inexorable des nouvelles technologies ;  de l’émergence de nouveaux pays qui représentent autant de nouveaux défis pour nos sociétés ; des évolutions démographiques qui bouleversent de savants équilibres ;  de la détérioration continue de l’environnement ; enfin, de l’éclatement des principaux piliers de nos sociétés : la famille, l’éducation, l’Etat… des Institutions en général.

Le temps, l’espace et l’incertain.

Certes ces phénomènes sont en germe depuis le début de l’ère moderne de l’industrialisation,  mais leur accélération est récente et foudroyante. Elle semble due à trois facteurs principaux : le temps, l’espace et l’incertain…

Le temps est devenu un luxe que plus personne, en responsabilité, ne peut s’offrir. Nous vivons à l’ère du « World 3’ ». Le monde est connecté, chaque question appelle une réponse immédiate. La technologie le permet : les consommateurs, les salariés, les citoyens, tous devenus internautes, l’exigent.  Ce facteur rend  obsolète la prise de recul et de réflexion auxquelles nous étions familiarisés. Elle appelle des reflexes et un mode de pensée  différents. L’accélération du temps fait de nous des êtres « fragmentés ».

L’espace s’est réduit. Pire, l’unité de lieu n’existe plus.  On peut travailler à distance, on peut travailler chez soi, on peut amener ses loisirs au bureau. « Work at home » ou “home at work”, on en attrape le tournis. La frontière entre vie professionnelle et  vie privée est totalement poreuse. Le village mondial ne dort pas.  Un tsunami au Japon provoque une rupture de la chaine automobile en Europe. Les frontières disparaissent : les flux migratoires sont incessants, 300 millions d’habitants migrent tous les ans ; nos enfants étudient à l’étranger et souvent y restent.  Cette réduction  de l’espace fait de nous des êtres « écartelés »

L’incertain devient la seule… certitude. Les modèles de référence n’existent plus ou deviennent obsolètes aussitôt qu’ils apparaissent. Dans les années 60 on allait chercher des réponses en lisant Peter Drucker ou en s’inspirant du modèle Japonais ; la fin du siècle dernier a consacré l’efficacité des modèles anglo-saxons ;  … Quel est le modèle de référence de ce début de siècle… ? Cette absence de repères fait de nous des êtres « déboussolés ».

L’Homme, blanc,  dominant,  n’apportera pas la réponse, seul !

La réaction dominante des populations face à ces nouveaux paradigmes est radicale. Elle se traduit  par une perte de confiance  dans ceux qui les gouvernent.  36 % des français  seulement font confiance à leurs dirigeants d’entreprise. Ils sont encore moins à faire confiance à leurs Institutions Publiques.  Ces chiffres sont en baisse constante de plus de 10 points en dix ans.

Parallèlement,  l’Occident est en perte de vitesse et d’influence. Son poids dans le monde est en recul constat. Le PIB de la zone Euro passera de 17 % à moins de 10% du  PIB mondial d’ici 2030 (OCDE). Dans le même intervalle la Chine sera la première puissance mondiale et L’Inde, le pays le plus peuplé.

Alors si le dirigeant blanc, occidental,  généralement de sexe masculin,  perd la confiance de ses concitoyens ou de ses salariés et perd son influence dans le monde, qui va répondre aux attentes légitimes de ceux qu’il gouverne ou dirige ?

A l’évidence il n’apportera pas la réponse, seul !

Pour autant des réponses existent, mais elles ne seront pas le fruit de cogitations in vitro ;  Il n’existe pas « one best way ». Ces solutions ne sortiront plus d’HEC ou de Harvard… Ces réponses sont multiples. Elles résulteront du croisement des identités et des cultures ; elles seront des partages d’expériences et d’opportunités.

Ce n’est pas une crise passagère à laquelle nous sommes confrontés,  mais bel et bien à l’émergence d’un nouveau monde, d’un nouvel Homme.  Jamais sans doute dans son histoire l’homme n’a été confronté à un changement aussi radical de son environnement. (Rapport Intelligence National Council,  global trends).

Pour y faire face, il devra puiser des réponses en lui par un effort accru et par une reconquête de lui-même -son chaos intérieur peut alors devenir une source de rédemption-, mais il devra aussi les chercher et les expérimenter avec les autres, tous les autres, y compris et surtout avec ceux qui sont les plus différents de lui.

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« Le chaos, abîme noir ou astre lumineux ? »  

bruno_luc_banton

(Par Bruno Luc Banton, propos recueillis par Isabelle Rey)

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Si, comme il a été dit plus avant, les bouleversements du monde exacerbent le sentiment d’un chaos, des causes plus profondes existent et sont ancrées en nous.

De multiples raisons peuvent nous amener à nous intéresser à cette question.

Nous venons peut être pour voir différemment un quotidien vécu comme assommant, usant, corrosif ; pour accéder à un angle de vue différent ; pour nous  sortir de quelque chose ; par curiosité ; pour progresser dans la recherche de réponses…

Toutes ces raisons sont légitimes  et parfaitement respectables. Elles font d’ailleurs partie de notre univers rationnel. Mais quelles qu’elles soient, nous ne ressentirons la question de notre chaos qu’en acceptant de faire vibrer en nous nos émotions, quitte à le faire en produisant des « fausses notes »  – les plus belles- car seul ce flot désordonné peut enclencher une démarche authentique.

C’est donc le champ des émotions, du ressenti, de « l’éprouvé »  qui devrait servir de tonalité à cette matinale.

Ce chaos-là est en nous depuis l’origine ou presque. En tous cas depuis l’instant de la séparation  (réelle ou symbolique d’avec  la mère). Cette  séparation qui fait de nous des êtres « errants, seuls et cherchants » pour le reste de notre existence.

Il faut en distinguer deux types de manifestations :

 1. les « symptômes de base », qui correspondent aux champs du programme du jour,

2. les «bruits de fonds » qui sont autant de signaux faibles qu’il faut savoir écouter.

1. Les symptômes de base

Ce sont des champs extérieurs, nos « Global business Units » en quelque sorte.

On peut citer pêle-mêle :

– la perte de sens,

– les névroses sociales, notamment la contraction du temps et de l’espace et leur relativité,

– l’effondrement des grands cadres tels que la famille, la religion, les croyances limitantes, voire délirantes,… qui nous amènent à aller chercher à l’extérieur  ce que nous ne pouvons trouver à l’intérieur.

Il vient abondamment d’en être question dans l’exposé liminaire et ces symptômes seront certainement au cœur de nos réflexions du jour.

2. Les bruits de fonds

Mais il existe d’autres sources qu’il faut aussi savoir écouter ce qui réclame un effort  supplémentaire car ce  chaos produit un bruit léger et assourdissant en nous ».  Ce sont ces chaos là qui sont les sources les plus fréquentes du «trébuchement de nombre de grands dirigeants » :

–   la brutalité,

–   la rupture de la confiance, de quelque chose de partagé,

–   la soudaineté comme source d’angoisse (la peur générant l’angoisse qui elle-même génère potentiellement l’anxiété),

–   l’incertitude, qui nous met face à ce qu’on ne connaît pas,

–   le provisoire,

–   l’éphémère

–   la perte de l’image de soi,

–   le manque,

–   l’abandon,

–   l’ambiguïté,

–   l’attente,

–   l’espéré qui ne vient pas,

–   le regard des autres,

–   le regard de soi sur soi, qui interroge la capacité à « baisser le masque », à vivre avec soi,

–   le désamour de soi,

–   le trop d’amour de soi, qu’on peut qualifier de « boursouflure de la personnalité ».

 

Le chaos peut nous détruire. Il est un « abîme noir » pour beaucoup. Il est déclencheur de profonds traumatismes.  Il peut être un facteur de souffrance, de douleur et de désarroi.

Pourtant, s’il peut nous tuer, il peut aussi nous faire vivre. Il devient alors une force de création, de vision ; il devient alors « un astre lumineux ».

A condition que nous soyons capables de faire résonner en nous un certain nombre de questions pour (re)trouver « une voie d’émerveillement » :

Comment vivre, « réconcilié avec soi » dans ce chaos ?

Comment retrouver l’état d’avant la séparation ?

Comment accepter « la juste dose » de traumatismes et y faire face en se réalisant ?

Comment trouver « sa juste place » ?

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Atelier Nouvelles Technologies

Atelier Nouvelles Technologies
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Atelier La Globalisation

Atelier La Globalisation
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Atelier La Démographie

Atelier La Démographie
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Atelier Le Sociétal

Atelier Le Sociétal
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Atelier L´Environnemental

Atelier L´Environnemental
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Première synthèse de nos travaux 

philippe_wattier

 

En reprenant les points qui sont communs à chacun des ateliers, on s’aperçoit que quelques thèmes majeurs apparaissent qui serviront  sans doute de trame à nos futures conférences.  Chacun s’est facilement accordé sur le fait que face au sentiment grandissant de chaos,  des solutions concrètes pouvaient être recherchées. Ce point est encourageant et nous conforte dans l’idée que le Cercle -lieu d’échanges d’expériences- peut apporter  une contribution et un angle de réflexion utiles à ses membres sur ce sujet difficile.

Il y a d’abord le thème de la nécessité d’un changement radical des modes de leadership et de gouvernance des hommes : un leadership de confiance !

A l’extrême, ce seul thème est d’une telle portée qu’il  pourrait « absorber » tous les autres. Les modifications de notre environnement professionnel, social,  environnemental… appellent de nouveaux comportements et de nouvelles manières de diriger les hommes. Le  leader devra recomposer son rôle. A l’exercice d’une autorité basée sur l’omniscience, devra succéder une autorité basée sur le partage et la confiance. En a-t-il l’envie, la capacité, la crédibilité ? Est- il capable de mettre en place une nouvelle relation de travail dans un esprit collaboratif ? Parvient-il à incarner l’entreprise et la marque pour redonner  envie aux autres de le suivre ? Tels sont les points principaux qui semblent avoir été identifiés.

Il y a celui de la libération de l’individu et des opinions sous l’effet de la montée  inexorable et continue des nouvelles technologies et de l’apparition du « village mondial ».

Les  NTIC donnent  un accès  universel au savoir ; elles  rendent les hommes autonomes sur leur lieu  de travail comme au dehors ; elles reposent  la question de la relation des hommes avec la connaissance et de la manière dont elle se transmet. De nouvelles formes  d’apprentissage apparaissent où se ne sont plus nécessairement les aînés qui enseignent aux plus jeunes.  De nouvelles relations générationnelles en découlent ;  elles remettent en cause les principes même de l’Education.

Par ailleurs, elles rendent le monde accessible à tous, tout le temps. Comment parvenir à exercer un management humain quand il est lointain et délocalisé ? Comment réussir à intégrer des communautés  de travail diverses ? Comment gérer des générations aussi différentes que celles des seniors et celles des digital natives ?  Comment tout simplement gérer  une entreprise où n’existe ni unité de lieu ou d’espace, mais qui devient un hub mondial où se connectent des communautés diverses ?

 Il y a celui d’une nécessaire prise en compte des enjeux sociétaux, mondiaux et du rééquilibrage des responsabilités entre des entreprises qui devront être de plus en plus soucieuses de leurs écosystèmes et des Etats qui ne pourront plus assurer seuls les systèmes de redistribution des richesses, englués dans les déficits abyssaux des finances publiques et confrontés à une crise de défiance sans précédent.

Ce rééquilibrage devra s’opérer dans un contexte de vieillissement de la population mondiale, où l’Occident perd peu à peu de son influence au profit d’un monde émergent qui vient  bouleverser un ordre établi depuis la Renaissance. Un Monde qui n’a pas le même souci de préservation de son environnement ou de défense des libertés individuelles, qui exprime sa diversité et qui aspire à sa part du gâteau, rendant plus complexes encore les relations entre les communautés et, par suite, l’exercice du leadership.

Enfin il y a le thème de la « reconquête de soi » qui englobe  tout à la fois la recherche de nouveaux repères ; la capacité à retrouver du sens à notre action face à ces nouveaux défis ;  l’impérieux besoin de retrouver du plaisir et de l’énergie créatrice dans nos diverses entreprises ; celui de la renaissance de soi-même par des actes résilients ; celui enfin, de (re)trouver un mode de relation à soi, aux autres, à notre environnement dans cet univers  différent.

L’identification de ces thématiques permettra certainement -après un rapide examen de chacune d’elles- d’établir ce qui constituera le programme de notre cycle 2013.

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 Photos : Emmanuelle Solinski   Emmanuelle75Solinski@yahoo.fr

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Partenaire académique du Cycle 2013 :

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 Partenaires du Cercle :

Les Partenaires du Cercle du leadership